Enduropale Vintage 2020

Course de sable mythique, l’Enduropale a de nouveau fait escale sur la plage du Touquet du 31 janvier au 2 février derniers. En 1975, Thierry Sabine organisait le premier « Enduro du Touquet », juste avant de créer le Paris-Dakar. Cela fait donc  44 ans que je rêve de participer à cette épreuve…

En 2015, les organisateurs ont eu la belle idée d’ajouter une nouvelle course Vintage au programme. Cette épreuve est désormais réservée aux motos pré-1996 selon un format d’une heure et limité à 600 participants. Cette course étant totalement en phase avec l’esprit SuperBolide, nous avons engagé le Team avec Philippe Lebeau au guidon, qui nous raconte cette belle aventure.

1er novembre 2019 : Ouverture des inscriptions

« J’y vais ? J’y vais pas ? J’y vais ? J’y vais pas ? j’y vais ! »

Je suis soulagé, j’ai enfin osé…  Je suis engagé à l’Enduro du Touquet !

Mais pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? On a toujours de bonnes « mauvaises » raisons de ne pas faire les choses : « Pas le temps », « C’est loin… », « Le niveau est devenu trop élevé », « Si tu ne t’entraîne pas à fond pendant 6 mois dans le sable, c’est pas la peine… », « T’es pas né sur place… », « Fait froid », « Bla bla bla… » Pour fêter ma 60ème année, je n’ai plus d’excuse. Je vais devoir m’entraîner un peu en motocross et je me demande si mes petits muscles vont tenir…

2 novembre 2019 : Je sors la bête

La moto Vintage sera une Yamaha 490 YZ de 1982. D’origine US, en atteste sa couleur jaune digne de Bob Hannah, elle n’a pas tourné depuis des années et, même si elle est de belle apparence, j’ignore comment elle marche. Elle m’est amicalement prêtée par Gilles, mon coéquiper de la Baja 1000 California 1988 qui m’honore de sa confiance. 

Premier essai de mise en route : laborieuse séance de kick suivie d’un surrégime, arrêt immédiat et retour de la moto au garage SuperBolide, puis démontage du carbu pour une révision/mise à neuf complète chez Peter Hartmann de chez HRD. En attendant, je cherche des informations sur les réglages de carburation spécifiques aux courses au niveau de la mer et les conseils de pilotage dans le sable.

1er janvier 2020 : Numéro 337

Je reçois mon numéro de course. Ferais-je mieux que 337ème en course ? 

Samedi 11 janvier 2020 : Entraînement à Monti

Il parait que rouler dans le sable, c’est physique, éprouvant pour les mécaniques, il y a plein d’autres concurrents qui font exprès de tomber devant tes roues, il faut s’entraîner pendant des mois, etc. etc. etc. 

N’ayant pas roulé en motocross depuis plusieurs années, et jamais dans le sable, un décrassage s’impose. Je rejoins donc Denis, éminent membre du corps des pilotes SuperBolide, pour une session de motocross sur le terrain de Monti dans les Alpes Maritimes. Un terrain magnifique et une superbe Suzuki 450 de 2018 : quoi de mieux pour se remettre en jambe ? Enfin, c’est surtout les bras et notamment les mains qui vont déguster.

La première session sur ce circuit typé supercross est plutôt perturbante. La Suzuki a tellement de couple que la moindre rotation de l’accélérateur embarque hors de l’ornière dans laquelle tu vires. Les tables, ça n’existait pas d’mon temps, ni les petits jeunes qui te tournent autour à Mach 2 (normal, c’était nous, les petits jeunes…). Je pilote raide et, rapidement, je ne tiens plus la meule, je subis le terrain… Bref, je rentre au parc au bout de deux tours, plein de questions, notamment sur ma capacité à tenir l’heure de l’Enduro du Touquet, fût-il Vintage.

Denis comprend mon désarroi et me rassure. Il prend la piste et je le regarde piloter ; le  bougre, malgré sa proximité avec la soixantaine, il roule fort et enchaîne tranquillement les tables. Je repars plus calmement pour une vingtaine de minutes. Je prends le temps de réapprendre et, progressivement, les sensations reviennent. Au terme de plusieurs sessions de plus en plus rapides, je retrouve un peu de pilotage et de la confiance. Je passe les petites tables (je m’écrase toujours sur les grosses) et prends beaucoup de plaisir, ce qui est essentiel ! 

Entre les sessions, je rencontre José, qui a participé à l’Enduropale Vintage 2019 et qui remet le couvert cette année. Il me raconte sa course et me donne encore plus envie d’être rapidement au départ.

Conclusion de l’après-midi : le MX c’est toujours aussi génial, même à l’approche de la soixantaine ! Et vive les gros 4 temps modernes…

Jeudi 16 janvier 2020 : Entraînement à Sézegnin (Suisse)

Premier et dernier test de la Yamaha 490 YZ avant l’Enduropale sur le circuit de Sézegnin du motoclub Les Meyrinos tout près Genève. Grosse séance de kick et de suée avant que la grand-mère veuille bien craquer… Sur ce petit circuit bien défoncé, la Yam est un vrai camion ; je crois que je ne passe jamais la 4ème… Après les premiers tours en panique, c’est progressivement la bonne éclate. 

En fin d’après-midi, les objectifs sont atteints : je sais que la moto fonctionne et j’ai un second entraînement dans les bras. Moteur et boite parfaits, Ohlins au top. Le freinage à l’avant est quasi inexistant, mais il ne servira pas beaucoup dans le sable… La fourche est super molle (normal à l’époque…) ; j’ai presque le mal de mer… 

Je fais une belle rencontre sur le circuit : j’ai l’impression de revenir 37 ans en arrière et de voir David Bailey ou Johnny O’Mara en piste. Laurent ne roule qu’avec des motos vintage et pilote aujourd’hui une magnifique Honda 250 CR 1983 dans un état quasi parfait. Il joue le jeu à fond : tenue JT complète d’époque, vrai casque JT (le plus beau casque de tous les temps), masque Scott, bottes Gaerne, le tout véhiculé dans un van Ford Econoline au son magique du V8.

Jeudi 30 janvier : En route pour le Touquet

Départ d’Annecy à 5h du matin, avec mes « ingénieurs de piste » Pascal et Tom. Nous nous relayons au volant du van pour arriver au Touquet en début d’après-midi. Nous retrouvons Simon, un pote local qui a couru l’Enduropale et l’Enduropale Vintage. Ses conseils me seront précieux. Nous enchaînons avec les contrôles administratifs et les vérifications techniques, que la belle Yam passe haut la main. Je n’en reviens pas qu’elle ait survécu au sonomètre avec son silencieux (tout est relatif…) d’origine. La plupart des motos engagées en Vintage sont magnifiques et je suis projeté trente à quarante ans en arrière…  La moto est dûment numérotée, je suis un peu stressé mais heureux d’être enfin là. Les vérifications techniques permettent de mettre en évidence des carences de préparation. Entre le pneu avant crevé au sortir de la camionnette, le constat que mes pneus, soit disant pour le sable, n’en sont pas, des bricoles que je n’avais pas vues lors de la préparation et un ressort de kick baladeur, l’après-midi sera riche en émotions. Finalement, après une séance de mécanique sur le trottoir, la Yamaha est rentrée dans le parc et bâchée. Demain, il faudra absolument que je dégonfle les pneus avant le départ…

Vendredi 31 janvier : Race day today !

Au matin, Amaury, un pilote du Team SuperBolide, nous rejoint, suivi de Yohan, un autre pilote annécien suffisamment courageux pour s’être engagé en 125cc ! Si c’est une première pour Yohan, Amaury a participé cinq fois à l’Enduro du Touquet et ses conseils me rassurent. A 11H, nous installons le stand de ravitaillement. L’heure du départ approche, les ennuis également…

Le programme était pourtant simple : à 13H30, le parc moto devait ouvrir ses portes aux pilotes, suivi d’une rapide séance de mécanique et de la mise en route du gros piston ; à 14h, était programmé le briefing, puis la traversée du Touquet en convoi jusqu’à la plage en vue d’un départ à 14H30. Bref, à 13h, je suis en train de pioncer (pardon, de méditer…) quand j’entends au loin un grand bruit de moteurs. Dans le doute, je m’habille en catastrophe puis fonce en courant vers le parc moto à un petit kilomètre de la camionnette. J’entends dans le lointain ce que je suppose être le briefing. Quand j’arrive au parc, toutes les motos sont en marche et les pilotes sont amassés près de la porte de sortie. Il reste une seule moto bâchée, la mienne ! Le départ a été avancé d’une demi-heure et je n’ai pas reçu l’information. Dans la précipitation, plus question de faire de mécanique. Les portes s’ouvrent et les pilotes partent en convoi, me laissant quasiment seul dans le parc. Sans outil, je n’arrive pas à dégonfler les pneus. Tant pis, je roulerai surgonflé. Pourvu que la moto démarre et que le kick ne lâche pas. Ca y est, elle craque. J’enfile mes lunettes et attaque la traversée du Touquet… tout seul ! J’arrive sur la plage et rejoins mes collègues pilotes entassés sur toute la largeur sèche, juste au moment où le départ est donné. Pour une première expérience dans le sable, c’est chaud. Assis sur l’arrière de la selle, je mets les gaz. Nous atteignons rapidement des vitesses élevées, mais je n’arrive pas à mettre à fond. La moto gigote, je m’y attendais, et j’ai besoin de comprendre ses réactions. J’ai surtout l’appréhension qu’un des gars tombe devant mes roues. A ces vitesses, ce pourrait être grave. Je ne prends pas le temps de regarder la mer, mais le spectacle est quand même fantastique. Amaury m’avait prévenu : « Au premier virage, qui est un gauche, tout le monde se jette à la corde et ça bouchonne. Tu prends l’extérieur en restant accéléré, et tu doubles, tu doubles… Et cela t’évite de serrer le moteur à la décélération… » A l’approche de ce virage, je me déporte vers la droite, réduit les gaz et prends une large trajectoire extérieure, complètement dégagée. Ca marche, merci Amaury ! Puis j’attaque le circuit, déjà complètement défoncé. Et là, cela devient du délire… Dès que je ne suis pas en accélération, la moto part dans tous les sens. Il y a une concentration phénoménale de pilotes, les trajectoires sont aléatoires, cela s’accroche, cela tombe de partout. Il y a des concurrents bloqués dans tous les intérieurs de virage. J’arrive à passer au travers du déluge, je double, me fait doubler, reçois des projections de sable, c’est la guerre ! Je ne fais pas longtemps illusion ; je pilote tellement crispé que je suis en train de me flinguer les mains et les bras, commence à ne plus maîtriser la moto, fais plein de fautes, m’essouffle ; je rentre dans le rang… Et soudain, à 15 mètres de la ligne de chronométrage, la moto part  violemment en angle droit, se couche et se bloque contre un piquet qui délimite le bord de piste. Et merde, elle cale ! Complètement suffoqué, je mets au moins une minute à la dégager et à la relever. Exténué, je n’arrive pas à kicker suffisamment puissamment pour la démarrer. Je suis mort. Par deux fois, je vois le leader de la course me dépasser… La victoire sera pour une autre année 😉

Au bout d’un quart d’heure d’efforts désespérés, le gros 2 temps consent à redémarrer. Je repars prudemment. J’avais programmé de faire deux tours avant de ravitailler. Au dernier moment, je décide de rentrer au parc afin de souffler un peu, histoire d’être en capacité de finir la course. Mes équipiers prennent en charge le ravitaillement de la moto et du pilote. Au moment de reprendre la piste, la moto ne démarre pas. Un autre pilote, qui a abandonné vient nous conseiller. On ne se connait pas mais on a échangé sur le forum du site leguidevert.com. Arnaud constate que la Yamaha a perdu beaucoup de compression. La moto démarre mais ne prend pas de tour. Cela ne sent pas bon pour la suite. Nous changeons la bougie et la Yamaha sonne plus clair. Je reprends la piste, puis arrive sur la ligne droite qui long la mer sur deux kilomètres. J’accélère un peu plus que lors du départ, il y a beaucoup moins de moto sur la trajectoire ; les sensations sont énormes. En revanche, je suis surpris de voir que la mer est bien remontée et que, par endroit, il n’y a plus beaucoup de largeur de piste. J’aperçois dans le lointain des gyrophares, plein de motos abandonnées, puis un drapeau rouge qui signifie l’arrêt de la course. J’apprendrais plus tard que cette montée imprévue des eaux est due au vent du large qui accélère l’effet de la marée. Nous ralentissons sous le drapeau, puis attaquons le premier virage à gauche. Dans le doute, je continue de rouler en direction du Touquet, tout comme les pilotes autour de moi. C’est encore plus défoncé, mais il y a un moins de monde. Puis la Yamaha commence à se faire récalcitrante. Elle perd inexorablement de la puissance. J’avance à l’agonie, notamment sur chaque bosse. Puis la belle jaune s’arrête définitivement alors que je vais achever le second tour. Sans moteur, impossible d’avancer la machine dans ce sable farineux, ne serait-ce que de dix centimètres. J’ai vraiment les boules !

Un rayon de soleil fait son apparition, éclairant la course avec une luminosité diaphane. Alors, je me retourne et assiste à la fin de l’Enduro du Touquet depuis le meilleur endroit : au milieu de la piste. La course a été effectivement arrêtée, il y a de moins en moins de pilotes. J’arrive alors à tirer la moto latéralement jusqu’au bord du circuit, la pose et remonte sur les berges. J’ai un petit kilomètre à pied pour rentrer au stand. Et là, je réalise la popularité de l’épreuve ;  c’est noir de monde ! Sur les trois jours de l’événement, malgré la météo maussade, plus de 300 000 personnes viendront voir l’Enduropale, ce qui en fait l’événement gratuit le plus fréquenté d’Europe et, soyons un peu chauvin, probablement du monde !

Je rejoins mon équipe au stand ; je réalise alors que j’ai eu beaucoup de chance dans mon malheur. Ayant franchi la ligne de chronométrage avant le drapeau rouge, je suis classé, loin certes, mais classé ! 45 ans après la première édition, j’ai terminé mon premier Enduro du Touquet, j’ai énormément appris, je sais désormais ce qu’il faut faire pour progresser, je sais avec quelle moto Vintage j’aimerais de nouveau participer à cette course (prioritairement une moto facile à démarrer !).

Pendant que je me change, un italien me tape sur l’épaule : « Ma qué, tou sais, les gens de notre âge, ils jouent aux boules ! Nous, on fait l’Endouro dou Touqué ! »

Objectivement, pour moi, la pétanque, ce n’est pas que pour les anciens et j’aime bien jouer de temps en temps, surtout dans le midi à l’heure de l’apéro… Mais je reviendrai aussi faire « l’Endouropale ».

Vivement l’édition 2021 !

Amaury, Pascal, Tom & Papa

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